Merlin le désenchanteur
« Après sa miraculeuse résurrection, Lazare eut trois enfants : Abraham Skybourne, Thomas Skybourne et Grâce Skybourne. Une fratrie parfaitement normale… si on met de côté le fait qu’ils sont indestructibles, immortels et chargés d’emprisonner des créatures mythologiques… Sans compter Merlin qui les menace de récupérer Excalibur, l’épée légendaire, et de libérer un fléau sur Terre. Ensemble, ils vont tenter de remettre le mage à sa place et épargner l’humanité d’un désastre assuré. »
Alors, alors, par où commencer ? Commençons par l’histoire. Comme l’indique le résumé judicieusement placé ci-dessus, nous allons suivre l’histoire des Skybourne qui vont se retrouver au prise avec un Merlin ayant légèrement tourné casaque. L’histoire est plaisante à suivre, pas de soucis là dessus. On sent que Frank Cho a bossé sur des super-héros dans la manière qu’il a de mettre en scène ses personnages. Les combats sont brutaux, violents et sont un vrai plaisir à suivre. On ressent la volonté de se faire plaisir de la part de l’auteur, de ne s’imposer aucune limite et c’est assez rafraîchissant. L’auteur a aussi un bon sens de la mise en scène et du rythme et sait prendre le contre-pied de ce qu’on attend pour donner au déroulé un fil conducteur loin d’être convenu.
Néanmoins, si la narration est globalement bonne, nous n’échappons pas à certains écueils, en particulier dans la volonté de ne pas faire un simple comics d’action. L’auteur lance quelques pistes, notamment avec Thomas, dont l’immortalité sonne en lui comme un poids et lui fait rechercher la mort sans la trouver. On sent une vraie envie de donner du corps à ses personnages mais l’auteur s’arrête à mi-chemin et donne une impression d’inachevé qui finit par alourdir la narration. Il y a aussi quelque chose que je trouve complètement hors de propos : c’est cette case censurée. De deux choses l’une : soit il s’agit d’une blague, dans ce cas-là l’aspect méta tombe à côté du ton global de l’histoire, soit c’est effectivement une censure et, dans ce cas-là, on se retrouve avec un gros bandeau disgracieux en plein milieu du volume. Je pense, et ça n’engage que moi, que soit on y va franco, soit on ne met rien mais se retrouver avec un entre-deux fait que le résultat est fort déplaisant.
L’éternité, c’est long… surtout vers la fin
Avec ce premier tome de Skybourne, il est évident que l’auteur souhaite poser les bases d’un univers qui lui est propre et qu’il va enrichir par la suite. Ces cinq chapitres publié initialement chez Boom, avant d’être traduits et publiés par Delcourt, sont un point de départ que l’on espère voir se développer. À noter, toutefois, qu’il est quand même dommage de parler du personnage d’Abraham Skybourne dans le résumé et de ne le voir apparaître à aucun moment dans le récit.
L’ouvrage en lui-même est d’excellente qualité avec une couverture cartonnée du plus bel effet et, en prime, un recueil des différentes couvertures à la fin, ce qui est toujours fort sympathique.
Skybourne est un premier essai en indépendant plutôt honnête de Frank Cho. Il n’est pas exempt de défauts mais possède suffisamment de qualités pour qu’on arrive à passer outre. Espérons que l’auteur arrive à continuer avec cette série et à l’améliorer pour la suite.