[TEST] Seers Isle, l’onirisme interactif

Seers Isle, un nouveau roman graphique signé Nova-Box, sorti en 2018 sur PC et Octobre 2020 sur Nintendo Switch. Sous la plume et le pinceau (et les lignes de codes) du studio français, embarquez avec ce récit sensitif, dans un voyage intérieur et initiatique au sein d’un univers médiéval fantastique.

Un roman graphique fantasmagorique

Tout comme les personnages happés par la tempête, le joueur est pris dans le tumulte d’une quête initiatique où de rares élus, retourneront dans leurs contrées en tant que chamans, garants de l’équilibre entre le monde des humains et celui des esprits : les Seers.

Le début du jeu est épuré, un bref tutoriel et l’aventure commence. À l’instar des personnages que nous découvrons, nous ne sommes jetés sur la plage de cette île sacrée qu’avec peu d’informations sur ce lieu et nos propres compagnons. Une seule certitude : atteindre le sommet de l’île et revenir ne sera pas donné à tout le monde.

Petit à petit, les membres du groupe se dévoilent au fil de la narration que nous décidons d’arpenter. Le chemin initiatique laisse rapidement place au mysticisme et à l’étrange. Au travers de nos choix, les apprentis se dévoilent, leurs motivations deviennent plus claires, ainsi que leurs craintes, leurs faiblesses. À mesure que le temps s’écoule et que le groupe progresse, nos décisions ne seront plus simples banalités « D’où viens-tu ?», « Tu n’avais pas de jouet préféré, toi, quand tu étais petit ?» laisseront leur place à choix moraux beaucoup plus décisifs dont une note des développeurs en début de partie donne le ton :

« La somme de vos choix mène à des hypothèses de narration différentes : il est impossible de “perdre” dans Seers Isle. Choisissez en votre âme et conscience »

L’interactivité, sous un autre angle

Très clairement, Seers Isle ne nous prend pas par la main. À l’instar des jeux interactifs, le gameplay offre des passages divergents dans une narration profonde. Le joueur oriente le dialogue, le point de vue de la narration et prend part aux décisions du groupe. Ces décisions irréversibles sont marquées par un sigle. Mais, là encore, le jeu laisse libre cours à l’interprétation du sens de ces voies. Dans cette ambiance étrange et surnaturelle, le bon sens et la logique dans la prise de décision ne sont plus de mise. Nous sommes aussi désemparés que le reste du groupe.

Tout comme eux, nous nous prêtons à tenter de déchiffrer les signes spirituels, afin d’y déceler un indice sur la marche à suivre. Mais rien n’y fait, nous devons avancer selon nos convictions profondes, sans cesse mises à mal.

Là est la force et l’intérêt de Seers Isle, le joueur se prête à une poursuite de compréhension qui n’est pas affectée par la re-jouabilité, au contraire. Le roman graphique de Nova-box, se propose et s’affirme au travers de la multiplicité des chemins narratifs.

Sobriété et contemplation

Seers Isle, s’adresse à un public particulier et prévenu, il ne s’agit pas d’un point-and-click et il laisse place à l’exploration ou à l’investigation des scènes, voire à des passages plus dynamiques avec des QTE par exemple. Nos seules options sont des choix de dialogues ou d’actions pour le groupe. Ce parti pris repose sur deux points : un scénario intriguant et sensitif ainsi qu’une ambiance graphique élégante. Il s’agit d’un roman graphique interactif faisant la part belle à la contemplation des scènes, œuvre de l’artiste Nicolas Fouqué.

Le jeu n’est pas lent ou amorphe pour autant. Non, tout le rythme transparaît au travers de la narration et propose une diversité de passages: que ce soit des moments calmes, touchants ou bien des instants plus énergiques, tendus. L’ambiance sonore est également un atout du titre. Tandis que l’on regarde les esquisses, la musique accompagne avec succès les moments de doutes, d’effarements…

Le fin mot

Seers Isle est un roman graphique s’adressant à ceux qui recherchent une expérience inédite, proche de la lecture d’un conte. La direction artistique, tant au niveau du dessin que de la musique, est un attrait rafraîchissant et enivrant. Petit point négatif. Le scénario, bien qu’intriguant, perd de son côté mystérieux, une fois la première partie terminée.

Seers Isle étant un jeu qui invite le joueur à réitérer l’expérience, une intrigue qui ne se dévoilerait qu’avec plusieurs parties, amènerait une intensité plus vive au titre de Nova-Box.

Crédits:

Développeur: Nova-Box 
Artiste principal & direction artistique: Nicolas Fouqué