[MAGIC 2017] Conférence de Michel Ancel (Rayman, BGE, Wild)

Lors du Monaco Anime Game International Conferences 2017, Michel Ancel a tenu une conférence autour de son métier, ses créations et son parcours plus globalement. L’occasion également pour le public de lui poser quelques questions. Nous allons donc revenir sur ce qui a été dit sur la carrière de Michel Ancel pour nous retranscrirons les questions et réponses en fin de conférence.

Tout a commencé très vite

Michel Ancel nous parle tout d’abord de son ascension fulgurante dans le monde du jeu vidéo, puis nous montre le premier prototype de Rayman, fait alors qu’il a 16/17 ans, qui n’est à ce moment-là qu’un dessin en pixels. Il a assez rapidement étoffé cet univers et voulu raconter des histoires autour de ce personnage – il créé une famille à Rayman, qui ne sera pas pleinement exploitée par la suite, Rayman est toujours célibataire. Michel Ancel commence à travailler pour Ubisoft à ses 17 ans. Sa carrière est donc relativement longue malgré le fait qu’il n’ait pas un âge si avancé que ça.

Le proviseur de son lycée était très circonspect à l’idée qu’il stoppe ses études pour se lancer dans le jeu vidéo : « ça n’a aucun avenir le jeu vidéo, c’est qu’une mode ça va disparaitre », comme quoi. Il s’est ensuite lancé à plein temps dans le jeu vidéo et l’équipe autour de Rayman, qui a débuté avec 2 personnes a très vite augmenté ses effectifs pour atteindre plus de 100 développeurs, pour répondre aux ambitions d’Ubisoft.

Michel Ancel a récemment retrouvé la version Super Nintendo et nous présente un visuel. Il devait ramener la cartouche pour faire tourner le jeu sur la mythique PlayStation Nintendo qui était présente sur le salon, mais par crainte d’abîmer la cartouche ou la console il n’en a rien fait. Au passage, il indique que c’est la première fois qu’il verra cette console, vu que les développeurs ne travaillaient que sur les spécifications données par le constructeur.

Le début du succès

A la question de savoir si tout le monde chez Ubisoft sentait que Rayman serait un succès, Michel Ancel s’est montré mesuré et a indiqué avoir fait l’objet de certaines « moqueries » lui disant que ce serait le « Mickey » d’Ubisoft, en rapport avec son design original, plus bedonnant. Il n’oublie pas de rendre hommage aux game designers qui l’ont accompagné et lui ont beaucoup appris, comme Serge Hascoët – maintenant responsable éditorial d’Ubisoft.

Après Rayman et la version 3D, sortie par la suite, Michel Ancel parle des Lapins Crétins et de sa façon de dessiner, mauvaise selon lui, mais qui permet de faire des choses différentes selon un de ses collègues. Lui et ses équipes se sont alors orientés vers des jeux plus orientés vers le scénario et donc Beyond Good and Evil. Il s’agissait des premiers jeux en 3D pour eux, en monde ouvert. La limitation était là pour des raisons techniques, la PlayStation 2 ou le Gamecube n’étant pas des monstres de puissance. Quelques concepts des personnages de Beyond Good and Evil 2 sont montrés et Michel Ancel précise que tout cela risque d’évoluer.

Maintenant que la limitation technique existe moins, le modérateur demande au créateur s’il n’a pas peur que ce manque de limites ne le fasse pas se disperser. En bref, cela ne semble pas le contrarier et il détaille le contenu du jeu – des planètes avec différentes villes qui évoluent selon ce qu’on y fait, entre autres. Le côté très lié au cinéma du jeu vidéo lui est encore plus apparu lorsqu’il a été invité par Peter Jackson en Nouvelle-Zélande pour travailler sur l’adaptation de King Kong. Ils ont donc essayé de comprendre ce que le jeu vidéo peut véhiculer.

Le futur entre Ubisoft et Wild Sheep Studio

Revenant sur de précédentes déclarations du développeur, le médiateur de la conférence lui pose la question de savoir si une trilogie de Beyond Good and Evil reste le plan principal quant à cette franchise. Michel Ancel lui répond alors que ce plan était une projection de l’époque suivant la sortie du premier opus et que la donne a changé. Il se projette avant tout sur Beyond Good and Evil 2 pour en faire l’expérience la plus complète possible.

Michel Ancel parle ensuite de certains points communs entre Wild et Beyond Good and Evil 2 tout en nous montrant certains travaux de reconstitution des animaux disparus pour le jeu de son studio indépendant. L’influence de Miyazaki est également évoquée autour de Wild, Michel Ancel évoque une sensibilité commune. Wild s’avère être un univers procédural, reste à voir ce que cela veut dire exactement – pitié, pas comme No Man’s Sky. Le jeu se jouera tant en ligne que seul, au choix.

Questions/réponses

Question : Beyond Good and Evil 2 est-il prévu sur Nintendo Switch ?

Réponse : Aujourd’hui, on n’a pas du tout de certitudes par rapport à ça. Je sais qu’il y avait des rumeurs, mais pas à ma connaissance. Après je ne suis pas business man, je ne sais pas tous les deals qui se font. En tout cas, nous, on est concentré sur le fait de faire le jeu. Ce qui est sûr c’est qu’on souhaite se concentrer sur le fait de faire exister le jeu et après on verra sur quoi on peut le faire tourner du mieux possible.

Question : Pouvez-vous nous parler des différences entre la version Switch de Rayman Legends, annoncée il y a peu, et celles des autres consoles ?

Réponse : Je suis vraiment désolé, je ne peux pas parler beaucoup de ce jeu parce que je mettrais trop de pression sur les gens qui sont en train de le faire. Le jeu tourne très bien sur la Switch et l’équipe, qui a beaucoup d’idées intéressantes, va attaquer ça et je ne veux pas dire des choses ici qu’ils seront obligés de faire. Mais ils ont envie – les développeurs de Pastagames, menés par Fabien Delpiano – d’exploiter les caractéristiques de la console. Après, c’est un jeu qui tourne naturellement bien sur la Switch, on l’avait fait pour la Wii U à la base, ça n’a pas marché énormément mais le faire revivre ce n’est pas uniquement pour des raisons commerciales, le jeu n’a pas rencontré son public malgré qu’on ait pris énormément de plaisir à le faire, donc ne serait-ce que pour partager cette éclate, on veut le faire. Le jeu est déjà rentabilisé de toute façon. En tout cas, il y a des niveaux musicaux que j’adore et j’espère qu’il y aura des surprises au niveau de kung-foot. J’en ai trop dit, il faut que j’arrête (rires).

Question : Est-ce qu’il peut arriver que l’arrivée d’une nouvelle console change complètement l’approche que prend un jeu ?

Réponse : Non, on est au courant assez tôt des spécificités des consoles qui sortent. On arrive mieux à anticiper ce qu’elles vont permettre de faire. En général, on évite de tout changer.

Question : Wild est-il toujours une exclusivité PlayStation 4 et voyez-vous une date ou du moins une année de sortie pour ce jeu ?

Réponse : Alors, je ne peux pas communiquer de date de sortie car ça ne se décide pas à mon niveau du tout. C’est un jeu qui est entièrement financé par Sony, qui a une grosse envie de pousser à l’originalité. Ce qu’on nous demande c’est « soyez créatif, soyez originaux », c’est une exclusivité PlayStation, donc désolé pour ceux qui ont pas la console mais c’est aussi ce qui fait que le jeu tourne très très bien sur la PlayStation 4 et pas seulement la Pro. On fait des choses qu’on aurait pas le temps ou les moyens de faire en multiplateformes.

Question : Pourquoi avoir choisi de fonder votre propre studio – ndlr : Wild Sheep Studio – alors que vous aviez l’habitude de travailler chez Ubisoft, que cela vous apporte-t-il ? Est-ce qu’un troisième Beyond Good and Evil dépendrait des ventes du second ?

Réponse : Pour Beyond Good and Evil, on est déjà concentrés sur le deuxième, on pense déjà à finir quelque chose. Pour le studio, on avait simplement la possibilité de le faire et il y avait un cercle de personnes qui s’était dit : « on pourrait le faire, on pourrait monter un studio », avec le recul on se dit que c’est bien difficile parce qu’on part de 0, d’une nouvelle technologie. C’est comme quand j’étais jeune et qu’on se disait qu’on pouvait faire des jeux mieux que Capcom, on n’a pas tellement changé, on a juste des cheveux gris. On est un peu couillons et fous. Il y a des gens qui disaient que j’étais frustrés chez Ubisoft, ce n’est absolument pas vrai. Quand on travaille avec des jeux comme Rayman Legends, on met ce qu’on veut dedans. Ubisoft et Sony cherchent des choses surprenantes. Il y a des jeux plus convenus, mais il y a aussi des désirs, dans la même boite, de choses plus surprenantes. A ce moment-là, ils nous demandent de travailler sur ce genre de choses.

Question : Quel est votre jeu préféré de ces dernières années, celui qui vous a le plus inspiré.

Réponse : C’est pas évident ça. La réponse la plus bateau ça serait Journey, je l’ai découvert au travers de mon petit garçon qui y a joué. J’ai voulu le faire jouer à Wind Waker, ça a été un cataclysme, il ne comprenait rien, la caméra, le lock, tout ça, même moi j’arrivais plus à jouer, c’était horrible. J’avais pris la version remaster sur Wii U, qui est super belle en plus. Quelques jours après, il a joué à Journey et j’ai vu cette espèce de bienveillance du jeu, là où Wind Waker est un titre exceptionnel mais qui n’était pas pour lui, par rapport au décalage entre le visuel et la difficulté pour un enfant de son âge. Journey a quelque chose, cette lumière, ce rythme, c’est pas stressant. Il aime quand ça bastonne mais là il a trouvé quelque chose, il y a quelque chose de mystérieux. Il y a quelque chose que je recherche moi dans les jeux que je fais, c’est que c’est indéterminé. On voit pas les limites, on comprend pas exactement quelles sont les limites du jeu, c’est flou et poétique. C’est dur de faire ça dans un jeu, généralement on voit vite les limites, on comprend l’objectifs, quand il y a un score ou autre. Je ne dis pas que c’est pas bien mais ça peut vite devenir un espèce de « sport », on complète des choses, ce qui rend tout ça mécanique. Alors que quand on se laisse aller dans une narration, une histoire, … Journey, c’est l’expérience, c’est génial de voir comment le jeu vidéo a évolué.

Merci à Michel Ancel et Shibuya Productions pour nous avoir permis d’assister à cette conférence. 

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