Lors du MAGIC 2017, nous avons pu rencontrer Tetsuya Nomura, l’occasion de lui poser quelques questions en compagnie de nos collègues d’autres médias lors d’une table-ronde. Voici ce que nous avons appris.
Finaland : Bonjour M. Nomura, merci de nous accorder un peu de votre termps. Pour commencer, je vais poser une courte question. Que préférez-vous entre la réalisation et le character design ?
Ce que je préfère c’est quand même la réalisation, puisque je suis complètement libre. Mais comme je suis entré en tant que designer dans la compagnie, il m’arrive toujours de faire du character design.
KHI : Nous savons que vous êtes un homme très occupé. Pouvez-vous nous décrire votre journée type ?
Plutôt qu’une journée, je vais vous parler d’une année. Je travaille toute l’année sans discontinuer. Je prends très peu de pauses alors que j’en ai de plus en plus besoin. Parce que vous le voyez, je prends de l’âge, je vieillis. Mes collègues ne semblent pas le remarquer et continuent à me donner du travail avec un rythme effréné, comme si j’étais toujours jeune et avais l’énergie d’autrefois.
FFDream : Pourquoi êtes-vous distant avec les réseaux sociaux ?
De nos jours avec les nouveaux modes de communication, on peut être très proche de ses fans. On le remarque avec les autres développeurs qui communiquent beaucoup. La seule chose qui me déplaît là-dedans c’est qu’on a tendance à se retrouver dans une situation où comme nous sommes devenus proches, nous devons faire attention aux informations que nous partageons. Nous devons nous retenir, et c’est surtout cette approche que je n’apprécie pas. Un ancien employé de la communication à l’époque me disait qu’il faut “avoir une certaine distance avec les fans, avec les personnes qui vous suivent”. Sans cette distance, on risque de ne plus être objectif et encore aujourd’hui, je continue à suivre cette recommandation.
FFDream : Et comment vous obtenez les avis de vos fans ?
Je regarde beaucoup les avis, mais je fais quand même en sorte de les regarder discrètement, sinon j’y pense trop.
GamersFlag : Un remaster HD des jeux de la Compilation of Final Fantasy VII (Before Crisis, Crisis Core et Dirge of Cerberus) aurait-il du sens selon vous pour rendre disponible tout le matériel narratif de cet univers sur une même console, comme cela a pu être fait avec les compilations de Kingdom Hearts ? Au-delà de la possibilité ou non de le faire, l’idée vous plait-elle ?
Si on parle de Final Fantasy VII Remake, qui est un titre chargé de mystère aujourd’hui, il sera différent du Final Fantasy VII original. Si on fait toute la compilation, ces jeux auront du mal à avoir un effet d’ensemble, d’entièreté (note de l’interprète : Le terme employé est très vague malheureusement…). Ce sera difficile puisqu’il n’y a pas de continuité entre la compilation et le remake pour le moment.
KHI : Quel est le jeu qui selon vous a été le tournant majeur de votre carrière ? Final Fantasy VII, qui a eu un immense succès en occident, ou Kingdom Hearts qui est votre premier jeu en tant que réalisateur ?
Kingdom Hearts (sans plus d’explications, ndlr).
Finaland : Vous avez un talent particulier pour réaliser des trailers et cinématiques d’introduction de grande qualité qui savent mettre les fans en émoi. Quel est votre secret ?
J’ai un processus assez répétitif. En fait, je regarde plusieurs fois ce que j’ai fait en me mettant ou en essayant de me mettre dans la peau de personnes différentes. Si par exemple je me mets dans la peau d’une personne qui est fan d’un certain produit, j’essaie de m’imaginer cela, je regarde le trailer et l’instant d’après je vais le re-visionner une fois de plus en me mettant dans la peau de quelqu’un d’autre.
FFDream : La maturité qui caractérise le jeu original sera-t-elle conservée dans Final Fantasy VII Remake ?
Il y a plein de choses qui changent, mais le fil de l’univers ne changera pas. Cela fait partie des choses qui resteront intactes.
GamersFlag : Question concernant la saga Kingdom Hearts en globalité, vous en avez parlé durant votre conférence mais, quels ont été vos arguments pour convaincre Disney et Square d’opter pour un héros inconnu à l’époque, Sora, au lieu de Donald ou Mickey ?
J’en ai un peu parlé sur scène : je leur ai proposé mon design et il s’avère que souvent, je n’écoute pas trop ce que les gens me disent. Alors je leur ai dit : “Non, je ne veux pas faire ça”, et finalement c’est passé. En fait, ce n’est pas si dur. Le truc, c’est que les japonais ne disent pas “non” clairement, ils n’annoncent pas leur avis contraire de manière directe. Cependant, je l’ai fait cette fois-ci et ça a surpris tout le monde, et à partir de là ils n’ont plus trop continué à m’imposer leurs idées. Finalement, j’ai trouvé cela plutôt facile.
KHI/Finaland : Votre style et vos travaux ont inspiré de nombreux jeunes artistes amateurs, notamment depuis vos travaux sur Kingdom Hearts. Quel message ou conseil souhaiteriez-vous leur transmettre ?
Je ne pense pas avoir inspiré tant de gens que cela. Je dirais qu’il faut vraiment faire ce que l’on a envie de créer. En tant que créateur, si l’on crée des choses uniquement en suivant les ordres qui nous sont donnés, on devient un outil ennuyeux à utiliser ou employer. C’est d’autant plus le cas lorsqu’on est un artiste “moyen”. Du coup, je pense qu’il faut rester flexible et trouver le bon équilibre entre le fait d’exécuter les ordres et savoir dire non pour préserver sa vision d’artiste.
Merci à Shibuya Productions pour l’organisation du Monaco Anime Game International Conferences 2017 et pour nous avoir permis cette entrevue.
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